Analyse : Cindy Sherman

par Artsmette

Analyse : Cindy Sherman
Cindy Sherman
Se tient en septembre 2020 jusqu'au début janvier 2021, à Paris, à la fondation Vuitton, une rétrospective de l’œuvre photographique de Cindy Sherman.
J'avais déjà eu l'occasion de parler de cette artiste lors d'une conférence sur l'autoportrait dont on pourra retrouver les différents chapitres sur http://www.artsmette.fr/2020/04/autoportrait-conference.html
Aujourd'hui, je choisis une des photographies de Cindy Sherman, un autoportrait sur un lit d'hôpital.
Technicité :
Un portrait-poitrine pris en contre-plongée donne à voir une personne sur son lit d'hôpital.
Une lumière blafarde provenant d'une part du plafonnier telle qu'on peut en trouver dans toutes les chambres hospitalières, d'autre part du bandeau lumineux à l'arrière-plan (celui-ci ne semble pas allumé mais joue des reflets de lumière). Les « effets » d'éclairage sont à peu près nuls  ou, pour le moins, discrets : il n'y a aucune volonté de magnifier la scène, elle apparaît dans sa réalité ordinaire.
La profondeur de champ est à la limite des flous de premier-plan et d'arrière-plan : flous très légers avec focalisation sur le visage.
Tout ce qui gravite autour du visage laisse une place importante au hors-champ : nous avons tous plus ou moins fait l'expérience d'une telle chambre et sommes capables de traduire les indices en un environnement plus important.
Les couleurs sont pastel rappelant la sobriété d'une chambre d'hôpital. Nous nous situons en un lieu clos, normalement confidentiel, en dehors de toute volonté de plaire.
L'image se partage en deux zone distinctes :
  • Celle du haut : le visage de la patiente.
  • Celle du bas : où domine un appareillage médical dont on devine qu'il est raccordé à un ensemble plus important.
Quelques lignes courbes dynamisent l'ensemble mais il est évident que la construction nous amène résolument au regard de la patiente. Construction triangulaire dont le sommet contient le cœur de la scène.
Interprétation :
Nous sommes bien loin des poses avantageuses de modèles en quête de reconnaissance d'amis ou spectateurs. Il ne s'agit pas, ici, d'obtenir des « like » ou des commentaires laudatifs.
La prise de vue renvoie une image de nos véritables préoccupations dès lors que nous sommes en état de faiblesse. Peu importe que notre maquillage soit avantageux ou non. Peu importe que notre coiffure soit soignée ou non. Peu importe que notre tenue soit sexy ou non...
Les enjeux sont ailleurs.
Le regard ne se tourne pas vers le ciel en quête d'une intervention divine, il interroge le personnel soignant. S'y mêlent espoir et inquiétude.
La bouche, fermée, comme retenant un cri ou une demande trop chargée de peurs, des craintes d'une mauvaise nouvelle, des mots qui désigneraient la maladie que l'on redoute.
Cindy Sherman ne nous regarde pas et, ce faisant, elle nous fait participer à ce douloureux moment d'incertitude.
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